15PRE’ FACE. dre de leur
capacité.
Mais, leur ſilence eſt glorieux:
le
Roy leur a confié les Barrieres du Royaume: ſans ceſſe
occupés à faire des Ouvrages nouveaux ou à maintenir les
anciens en bon état, ils ſont privés du loiſir qu’il faudroit
pour répandre leurs lumieres, & ſe contentent de les com-
muniquer à ceux qui travaillent ſous leurs ordres.
Roy leur a confié les Barrieres du Royaume: ſans ceſſe
occupés à faire des Ouvrages nouveaux ou à maintenir les
anciens en bon état, ils ſont privés du loiſir qu’il faudroit
pour répandre leurs lumieres, & ſe contentent de les com-
muniquer à ceux qui travaillent ſous leurs ordres.
Mais, ſi l’on fait réfléxion qu’on s’inſtruit fort lentement
quand on n’aprend les choſes qu’à meſure qu’elles ſe pre-
ſentent, & qu’il arrive rarement qu’un jeune Ingenieur
puiſſe voir dans une même Province toutes les differentes
eſpeces de Travaux qui dépendent des Fortifications; l’on
conviendra, que rien ne ſeroit plus utile qu’un bon Livre,
dans lequel il pût acquerir une connoiſſance generale de
toutes les parties de ſon métier: afin que, venant à paſſer
d’une Place à une autre, il ne ſe préſente rien dont il ne
puiſſe avoir la conduite, dès qu’il joindra la Théorie à ce
que la Pratique pourra lui apprendre. Il feroit alors beau-
coup plus de progrès, & pourroit en peu de tems ſe met-
tre en état de marcher ſur les traces des plus grands
maîtres.
quand on n’aprend les choſes qu’à meſure qu’elles ſe pre-
ſentent, & qu’il arrive rarement qu’un jeune Ingenieur
puiſſe voir dans une même Province toutes les differentes
eſpeces de Travaux qui dépendent des Fortifications; l’on
conviendra, que rien ne ſeroit plus utile qu’un bon Livre,
dans lequel il pût acquerir une connoiſſance generale de
toutes les parties de ſon métier: afin que, venant à paſſer
d’une Place à une autre, il ne ſe préſente rien dont il ne
puiſſe avoir la conduite, dès qu’il joindra la Théorie à ce
que la Pratique pourra lui apprendre. Il feroit alors beau-
coup plus de progrès, & pourroit en peu de tems ſe met-
tre en état de marcher ſur les traces des plus grands
maîtres.
On ne peut diſconvenir, qu’un tel Livre ne fût d’une
grande utilité; ſans doute que l’on m’accuſera de temerité
d’avoir ôſé l’entreprendre. Quand je l’ai commencé, ſi j’en
avois conçû toute la conſéquence, je me ſerois bien gardé
d’y penſer; peut-être aurois-je pris le parti le plus ſage,
& me ſerois épargné par-là beaucoup de peines & d’in-
quiétudes. Mais, ce n’eſt ordinairement qu’après avoir tra-
vaillé long-tems, qu’on s’apperçoit du danger qu’il y a de
ſe faire imprimer; parceque, devenant plus délicat, on
ceſſe de voir ſes Ouvrages avec la même complaiſance:
on mépriſe au bout de quatre jours ce qu’on avoit trouvé
paſſable d’abord, & on n’eſt jamais content de ſoy par
l’envie qu’on a de mieux faire.
grande utilité; ſans doute que l’on m’accuſera de temerité
d’avoir ôſé l’entreprendre. Quand je l’ai commencé, ſi j’en
avois conçû toute la conſéquence, je me ſerois bien gardé
d’y penſer; peut-être aurois-je pris le parti le plus ſage,
& me ſerois épargné par-là beaucoup de peines & d’in-
quiétudes. Mais, ce n’eſt ordinairement qu’après avoir tra-
vaillé long-tems, qu’on s’apperçoit du danger qu’il y a de
ſe faire imprimer; parceque, devenant plus délicat, on
ceſſe de voir ſes Ouvrages avec la même complaiſance:
on mépriſe au bout de quatre jours ce qu’on avoit trouvé
paſſable d’abord, & on n’eſt jamais content de ſoy par
l’envie qu’on a de mieux faire.