15219DE VITRVVE.
ſequerir le bruit de bons ouuriers:
comment pourroit vn Archi-
tecte, qui doit eſtre meflé de beaucoup de ſciences, ſe faire grand
& admirable en toutes, ſi bien qu’il n’y ayt que redire? ains ſurmõ-
te rous autres artiſans, encores qu’ils ayent continuellement em-
ployé leurs eſtudes en doctrines diſtinctes, & mis vne extreme
diligence à en ſçauoir ce qu’il en faut? Il eſt maintenãt bon à voir
que Pythius a failli en ſa tradition, pource qu’il n’a bien regardé
que tous les arts ſont compoſés de deux choſes, à ſçauoir de l’ęu-
ure & de ſon diſcours: deſquelles faut neceſſairement que l’vne
ſoit propre à ceux qui s’exercitent en vne ſeule ſcience: & celà eſt
ou l’effect de l’ouurage, ou l’autre, qui eſt commune à tous hom-
mes doctes, que i’ay deſia dicte, diſcours: comme ſeroit entre les
Medecins & les Muſiciens, quand les vns pa@lent du poux des
veines, & les autres des temps de leurs meſures. Ce neantmoins
s’il faut medeciner vne playe, ou tirer vn patient de peril, le Muſi-
cien n’en fera pas l’office, pource que c’eſt le propre du Medecin:
lequel en ſemblable pour donner plaiſir aux oreilles par la dou-
ceur de ſes chanſons, ne rendra pas melodie de ſa voix, mais ſera
le Muſicien. Pareillement il y a diſpute commune entre les A-
ſtrologues & iceux Muſiciens, fondee ſur la ſympathie ou conue-
nance des eſtoiles, & la ſymphonie ou modulation des accents, en
quadrats, trigones, diateſlaron, & diapente. Puis encores y a con-
trouerſe entre les Geometriens & les deſſus nommés Aſtrolo-
gues ſur le poinct de la veuë, qui eſt dit par les Grecs Opticos,
c’eſt à dire Perſpectiue, & ainſi en tous autres ſçauoirs: car routes
choſes, ou la pluſpart, ſont communes ſeulement en termes de
diſpute: mais les principes des ouurages, qui par l’artifice de la
main ou ordonnances de l’ouurier doyuent paruenir au poinct
de beauté, ſont propres & particuliers à ceux qui ſont inſtitués en
l’art, ſi bien qu’ils ſçauent par où en venir à bout. Ceſtuy là don-
ques ſemble auoir aſſez faict, qui a moyenne congnoiſſance des
doctrines, chacune en ſon endroit, enſemble de leurs raiſons &
parties, ſpecialement de celles qui ſont requiſes pour l’Archite-
cture, à fin que s’il eſt beſoin de juger ou prouuer quelques cho-
ſes qui concernent celà, il ne faille comme ignorant: car ceux à
qui nature a tant donné d’induſtrie, viuacité d’eſprit, & fertilité
de memoire, qu’ils peuuent auoir parfaicte congnoiſſance de
Geometrie, Aſtrologie, Muſique, & toutes autres diſciplines, tels
certainement paſſent le but d’Architectes, & deuiennent Mathe-
tecte, qui doit eſtre meflé de beaucoup de ſciences, ſe faire grand
& admirable en toutes, ſi bien qu’il n’y ayt que redire? ains ſurmõ-
te rous autres artiſans, encores qu’ils ayent continuellement em-
ployé leurs eſtudes en doctrines diſtinctes, & mis vne extreme
diligence à en ſçauoir ce qu’il en faut? Il eſt maintenãt bon à voir
que Pythius a failli en ſa tradition, pource qu’il n’a bien regardé
que tous les arts ſont compoſés de deux choſes, à ſçauoir de l’ęu-
ure & de ſon diſcours: deſquelles faut neceſſairement que l’vne
ſoit propre à ceux qui s’exercitent en vne ſeule ſcience: & celà eſt
ou l’effect de l’ouurage, ou l’autre, qui eſt commune à tous hom-
mes doctes, que i’ay deſia dicte, diſcours: comme ſeroit entre les
Medecins & les Muſiciens, quand les vns pa@lent du poux des
veines, & les autres des temps de leurs meſures. Ce neantmoins
s’il faut medeciner vne playe, ou tirer vn patient de peril, le Muſi-
cien n’en fera pas l’office, pource que c’eſt le propre du Medecin:
lequel en ſemblable pour donner plaiſir aux oreilles par la dou-
ceur de ſes chanſons, ne rendra pas melodie de ſa voix, mais ſera
le Muſicien. Pareillement il y a diſpute commune entre les A-
ſtrologues & iceux Muſiciens, fondee ſur la ſympathie ou conue-
nance des eſtoiles, & la ſymphonie ou modulation des accents, en
quadrats, trigones, diateſlaron, & diapente. Puis encores y a con-
trouerſe entre les Geometriens & les deſſus nommés Aſtrolo-
gues ſur le poinct de la veuë, qui eſt dit par les Grecs Opticos,
c’eſt à dire Perſpectiue, & ainſi en tous autres ſçauoirs: car routes
choſes, ou la pluſpart, ſont communes ſeulement en termes de
diſpute: mais les principes des ouurages, qui par l’artifice de la
main ou ordonnances de l’ouurier doyuent paruenir au poinct
de beauté, ſont propres & particuliers à ceux qui ſont inſtitués en
l’art, ſi bien qu’ils ſçauent par où en venir à bout. Ceſtuy là don-
ques ſemble auoir aſſez faict, qui a moyenne congnoiſſance des
doctrines, chacune en ſon endroit, enſemble de leurs raiſons &
parties, ſpecialement de celles qui ſont requiſes pour l’Archite-
cture, à fin que s’il eſt beſoin de juger ou prouuer quelques cho-
ſes qui concernent celà, il ne faille comme ignorant: car ceux à
qui nature a tant donné d’induſtrie, viuacité d’eſprit, & fertilité
de memoire, qu’ils peuuent auoir parfaicte congnoiſſance de
Geometrie, Aſtrologie, Muſique, & toutes autres diſciplines, tels
certainement paſſent le but d’Architectes, & deuiennent Mathe-