143De l’Artillerie.
iuſques à vn petit pertuis qu’ily laiſſa pour luy donner le feu;
il en eſprouua la force &
l’effect, lequel puis apres il communiqua à d’autres. Ce qui ſuffira pour ſcauoir de qui, en
quel pays ou region la poudre & artillerie a eſté inuentée.
l’effect, lequel puis apres il communiqua à d’autres. Ce qui ſuffira pour ſcauoir de qui, en
quel pays ou region la poudre & artillerie a eſté inuentée.
CHAP. II.
Auquel eſt declaré en quelle Prouince de P Europe l’Artillerie a premie-
rement esté miſe en œuure.
rement esté miſe en œuure.
NOVS auons au chapitre precedent deduit aſſez au long &
au clair, &
confirmẽ
par teſmoignages ſuffiſans, quia eſté le premier inuenteur & de la poudre & de
l’artillerie: reſte que nous nous enquerions auſſi, en quel lieu, & de qui elle a
eſté premierement miſeen œuure; En quoy nous enſuiurons Paul Interien, & Ligurce,
tous deux autheurs graues & dignes defoy. Et quant a Ligurce, il eſcrit en ſes annales de
Gennes, qu’en l’an de Chriſt 1366. auquel pour certaines differences qu’ily auoit entre la
Seigneurie de V eniſe & de Gennes, les Venitiens ayans aſſiegé vne ville nommée Clau-
dia foſſa, que les Gennois leur auoient priſe, ily eut en cedit ſiege quelques Alemans, qui
ayans deux petites pieces d’artillerie de fer, auec certaine prouiſion de poudre & des bou-
lets de plomb, les preſenterent, comme choſe rare & bien propre, à leur intention, à ladite
Seigneurie de Veniſe, quivoyant le bon effect d’icelles conticles cnnemis (qui tout eſ-
pouuantez de la violence de ces machines in cognuës, & ne ſe pouuantreparer contre cet-
te fureur diabolique, y laiſſerent pluſieurs morts ſur la place) les receut biẽgracieuſement.
Et cecy eſt le plus clair & le plus certain, qui ſelon le peu quei’ay eſtudié, i’ay peutrouuer
quand à ce point. Mais quand à la façon, il eſt tout certain, que les premieres pieces ont
eſté fort mal faites, compoſées auec grande peine, & non ſans danger miſes en œuure.
Car ne ſçachant encor rien de la fonte d’icelles, on ſe contentoit de prendre quelques groſ-
ſes & fortes tables ou lames de fer, leſquelles on compoſoit & ageançoit enrond, les ſer-
rant de gros anneaux ou cercles de fer, comme on voit és tonneaux: & cecy onle char-
geoit d’vne poudre groſſe & mal propre comme elle eſtoit dés le commencement de ſon
inuention a diſcretion: c’eſtoient les canons & l’artillerie de laquelle on vſoit en pluſieurs
endroits de l’Europe, iuſques à ce qu’auec le temps l’eſprit humain cherchant touſiours
plus auant, en a trouué le moyen, & derafiner la poudre, & de fondre le fer & le cuiure
pour en faire des pieces de fonte, qui pour lors eſtoient en grand’ eſtime. Mais conſiderant
que celles de fer ſe gaſtent facilement, & celles de cuiure n’eſtre trop fermes & aſſeurées;
on a trouué en fin vne mixtion de cuiure & d’eſtain propre pour en faire des pieces dura-
bles, auſquelles auſsi on a donné des noms ſelon leur naturel & portéc, comme cy-apres
ſera monſtré.
par teſmoignages ſuffiſans, quia eſté le premier inuenteur & de la poudre & de
l’artillerie: reſte que nous nous enquerions auſſi, en quel lieu, & de qui elle a
eſté premierement miſeen œuure; En quoy nous enſuiurons Paul Interien, & Ligurce,
tous deux autheurs graues & dignes defoy. Et quant a Ligurce, il eſcrit en ſes annales de
Gennes, qu’en l’an de Chriſt 1366. auquel pour certaines differences qu’ily auoit entre la
Seigneurie de V eniſe & de Gennes, les Venitiens ayans aſſiegé vne ville nommée Clau-
dia foſſa, que les Gennois leur auoient priſe, ily eut en cedit ſiege quelques Alemans, qui
ayans deux petites pieces d’artillerie de fer, auec certaine prouiſion de poudre & des bou-
lets de plomb, les preſenterent, comme choſe rare & bien propre, à leur intention, à ladite
Seigneurie de Veniſe, quivoyant le bon effect d’icelles conticles cnnemis (qui tout eſ-
pouuantez de la violence de ces machines in cognuës, & ne ſe pouuantreparer contre cet-
te fureur diabolique, y laiſſerent pluſieurs morts ſur la place) les receut biẽgracieuſement.
Et cecy eſt le plus clair & le plus certain, qui ſelon le peu quei’ay eſtudié, i’ay peutrouuer
quand à ce point. Mais quand à la façon, il eſt tout certain, que les premieres pieces ont
eſté fort mal faites, compoſées auec grande peine, & non ſans danger miſes en œuure.
Car ne ſçachant encor rien de la fonte d’icelles, on ſe contentoit de prendre quelques groſ-
ſes & fortes tables ou lames de fer, leſquelles on compoſoit & ageançoit enrond, les ſer-
rant de gros anneaux ou cercles de fer, comme on voit és tonneaux: & cecy onle char-
geoit d’vne poudre groſſe & mal propre comme elle eſtoit dés le commencement de ſon
inuention a diſcretion: c’eſtoient les canons & l’artillerie de laquelle on vſoit en pluſieurs
endroits de l’Europe, iuſques à ce qu’auec le temps l’eſprit humain cherchant touſiours
plus auant, en a trouué le moyen, & derafiner la poudre, & de fondre le fer & le cuiure
pour en faire des pieces de fonte, qui pour lors eſtoient en grand’ eſtime. Mais conſiderant
que celles de fer ſe gaſtent facilement, & celles de cuiure n’eſtre trop fermes & aſſeurées;
on a trouué en fin vne mixtion de cuiure & d’eſtain propre pour en faire des pieces dura-
bles, auſquelles auſsi on a donné des noms ſelon leur naturel & portéc, comme cy-apres
ſera monſtré.
CHAP. III.
Deſcription des premieres pieces qui furent forgées de fer.
CES pieces cy ſignées ſont bien les premieres, qui apres l’inuention de la poudre fu-
rent en diuers endroits de l’Europe miſes en œuure, mais deſquelles les canonniers
de noſtre temps ne ſe pourront gueres ſeruir. Toutesfois i’en ay voulu faire mention
& les tracer, afin que de leur forme tant lourde & impertinente, qui fait auſsi l’v ſage quaſi
du tout inutil, on puiſſe remarquer combien la fonte de noſtre temps eſt plus propre, & cet-
te ſcience plus parfaite.
rent en diuers endroits de l’Europe miſes en œuure, mais deſquelles les canonniers
de noſtre temps ne ſe pourront gueres ſeruir. Toutesfois i’en ay voulu faire mention
& les tracer, afin que de leur forme tant lourde & impertinente, qui fait auſsi l’v ſage quaſi
du tout inutil, on puiſſe remarquer combien la fonte de noſtre temps eſt plus propre, & cet-
te ſcience plus parfaite.